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mercredi 27 avril 2011

Le 20 Février : Avec nous, ou contre nous ? Et si il y avait une troisième voix ?


Aujourd'hui, au Maroc, nous vivons tous un changement qui frappe toute la région arabe : ce vent régional a un nom local, un nom Marocain : le 20 février, #Feb20 en langage twitter.

Avant son début, j'étais sceptique quant à l'évolution de ce mouvement vers un mouvement violent pour 3 principales raisons :
  1. La première raison était : la fâcheuse habitude de nos services de sécurité de tabasser tout ce qui bouge : on ne pouvait pas imaginer qu'elle changerait de manière de procéder et si rapidement.
  2. La deuxième est que le groupe de jeunes qui ont initié le mouvement étaient inconnus et avaient des requêtes aussi anarchistes que totalitaristes.
  3. Et la troisième qui découle des deux premières : Un embrasement quasi prévisible avec une "importation" d'un conflit tel qu'en Égypte ou Tunisie avec les corps de Marocains tués par d'autres Marocains.
Le soir même du 20 février, j'étais dans un plateau télé en directe. J'avais passé la journée en étant agréablement surpris à la fois par les manifestants sortis dans le calme et aussi par les services de l'ordre respectant ces manifestations pacifiques.
Respectant, peut-être trop, puisqu'il y avait eu des casseurs qui s'en sont pris à des biens privés et publics avec une intervention tardive des forces de l'ordre.

Au fur et à mesure, plusieurs personnes m'ont demandé, à la fois, dans le réel ou sur internet, qu'elle était ma position et mon avis sur le mouvement du 20 février. Et voici ma position :

Je ne suis ni Pro, ni Anti-20 février dans son action actuelle, comme je ne pourrai être Pro -par exemple- USFP ou Anti PJD ou bien Pro Barça ou Anti Raja ! :)

Toute personne a le droit d'exprimer, de manifester en toute liberté sans porter atteinte aux biens publics ou privés. 

Par contre, j'ai le droit d'être Pro une proposition et être Anti une position. Du moment que le 20 février, n'a pas de propositions et de positions, je ne peux m'exprimer.

Par contre, j'ai un avis, comme chacun de nous à un avis sur quasiment toute chose.

Donc pour faire plus simple, je fait la part entre ceux qui mènent le "jeu" du 20 février et les autres manifestants, et je met mes avis dans un case j'ai aimé ou je n'ai pas aimé :

J'ai aimé dans le 20 février : Les résultats :

  • Que les requêtes des citoyens les plus démunis retrouvent un moyen pour s'exprimer. Que la parole se libère encore plus (impulsé en partie par le mouvement).
  • La pression qu'il maintient et qu'il se doit de maintenir intelligemment sur ceux et ces systèmes qui ont abusé des Marocains : modifiant ainsi la balance des pouvoirs en faveur d'une partie du peuple.
  • Accélérer une révision globale de la constitution, la forme écrite d'un nouveau pacte social. Tout en sachant que cette révision prenait son cours trop lentement avant le 20 février.

Je n'ai pas aimé dans le 20 février : les moyens

L'opacité :

Le 20 février demande de la transparence : Que l'état nous dise tout et ne cache rien. Le 20 février devrait aussi tout dire aux Marocains qui le suivent.
Qui sont les vrais leaders ?
Une opacité de leadership, qui est en soit, peut être acceptable, mais contrairement à ce que annonce le mouvement, le 20 février a bien des leaders qui le dirigent de près ou de loin.
Une opacité dans le financement et dans le soutien logistique :
Plusieurs photos ou vidéos suggèrent que certains mouvements -et partis- politiques mettent à disposition du matériel, des locaux et probablement du financement. Pourquoi ne pas l'annoncer aux citoyens et à l'opinion publique ?

Quelles sont les valeurs que défend le 20 février ?

Quand on sait -par exemple- que les Adlistes (le mouvement islamiste anti-Monarchie) qui encadre une bonne partie des manifestations, défendent un modèle de société (basé sur le religieux).
Est-ce que ce modèle est compatible avec les valeurs du 20 février ?

Une force de contestation sans propositions :

Quasiment tout le monde est contre la corruption, le népotisme, les abus... Mais comment y arriver ?
Dire non -ce que fait le 20 février- est une première étape qui doit mener inéluctablement vers une solution.

Dire non et surtout prendre en otage la volonté des manifestants en disant : soit vous en finissez avec la corruption -par exemple- soit on commence un sit-in illimité !

Se cacher dans la masse :

Il y a eu plusieurs cas, ou des membres "présumés" du 20 février ont exprimé des avis ou même criés des slogans qui, au cas ou, ils sont diffusés auprès des manifestants, le 20 février perdrait une bonne partie du soutien populaire. (Comme cette vidéo ou un orateur dans une manifestation du 24 avril à El Jadida comparait le Roi Mohamed VI avec Kadhafi, Ben Ali et Moubarak.)

Dans une majorité des cas, ces membres ont été soit renvoyés des rangs, soit prétendre que ce n'est pas des membres du mouvement.

"Vous êtes avec nous -le 20 février- ou contre nous" :

Aujourd'hui, ceux qui n'adhèrent pas au mouvement ou expriment ouvertement leur désaccord avec lui sont traités de Baltajiya, de Makhzénistes, de lèche-botte au régime...

Par contre, ils encensent toute action du mouvement parfois tombant dans une propagande flagrante.

Avant le 20 février, il n y avait rien :

Des fois, les écrits de certains qui soutiennent le mouvement par leurs écrits et même des leaders reconnus, prétendent qu'avant le 20 février, il n y avait ni "vrais militants" ni libertés ni honnêteté.

Tout changement qui intervient après le 20 février, n'est et ne peut être que le fruit du travail du 20 février.
En tout, avant le 20 février, il n y avait RIEN !

En tout :

Comme tout Marocain, je me réjouis que mon pays change, avance, bouge...

Aujourd'hui, le 20 février est né d'une conjoncture régionale et de requêtes tellement larges qu'on ne peut qu'être d'accord avec une grande partie d'entre elles.

Mais comme tout mouvement politique, il aura son heure de gloire (ou pas).

Afin d'atteindre le but commun d'un Maroc meilleur et autant que citoyen, il serait nécessaire d'avoir un contre-pouvoir réel, honnête, transparent et crédible.

Un Maroc Meilleur, ce n'est pas un but instantané, mais c'est un combat continu dans le temps. Un combat recadré par une critique. 

Et chaque système, tel qu'il soit, qui ne se soumet pas à la critique est condamné à la déchéance ou même à la dérive.

Et toujours, nous avons besoin d'un avis et de son opposé, d'un pouvoir et d'un contre-pouvoir pour créer un juste milieu sans perdre en vue nos valeurs communes.