Il y a quelques jours, j'ai reçu un appel de la part de la commission consultative qui se charge de la rédaction de la constitution (et je remercie le blogueur qui a donné mon nom).
J'interviens, donc, à titre personnel et non comme membre associatif d'une association féminine.
Avant même cet appel, j'avais prévu de rédiger un article -et même de créer un site, d'ailleurs, je suis propriétaire du nom de domaine dostour.ma- pour ouvrir le débat à propos de cette refonte historique de la constitution.
Sauf, que dans une journée, il n y a -malheureusement- que 24 heures, et devant mes charges professionnelles, associative et personnelles, je ne pouvais avancer dans ce projet.
Je partage avec vous, les idées d'un simple marocain, sans pour autant m'encenser par telle ou telle expertise.
Donc, pour répondre à la question primordiale : quoi mettre dans cette nouvelle constitution, je me suis posé une autre question en me basant sur deux postulats :
- Une constitution doit gérer les relations entre les différents pouvoirs dans un pays et tracer les grandes lignes d'un pacte sociale qui sert le bien-être de tous les citoyens.
- Une constitution doit être un cheminement actuel entre l'histoire et le futur.
Je crois que l'on ne réinventera pas la roue, et qu'il y a une multitude d'exemples qui peuvent servir de référence à un modèle de constitution qui se doit d'être typiquement Marocaine.
Nous avons, au Maroc, un privilège dans le temps et dans la forme qui nous permettraient d'innover considérablement dans cette constitution future.
Un privilège dans le temps, car quasiment tous les pays développés ou émergents ont déjà mis en place des constitutions, plus ou moins détaillées et qui pourront servir de référence dans la rédaction de notre constitution.
Un privilège dans la forme car jusqu'à aujourd'hui, le Roi a nommé une commission CONSULTATIVE que je nommerai de rédacteurs ou de scribes qui ne font que rédiger les différentes visions. Cette commission ou plutôt son écrit gagnerait en légitimité si l'ébauche de la constitution passait en débat au parlement avant d'être soumise au référendum.
Cela serait idéal, comme il est idéal d'avoir un vrai parlement, avec de vrais parlementaires capables de défendre des clauses ou de proposer un changement dans d'autres. Ce qui n'est pas le cas de notre parlement aujourd'hui.
Et c'est là, l'une des problématiques réelles de la forme de la commission consultative.
Réponse à ma question :
Pour revenir à la question, j'imagine le Marocain de demain comme un citoyen libre et responsable, ou chacun jouit de ses droits et accomplit ses devoirs en toute équité envers son pays et aussi envers l'humanité (je reviendrai à ce concept de devoirs envers l'humanité dans un autre article).
J'imagine le Maroc de demain comme un pays égalitaire qui donne toutes les chances possibles à ses citoyens de vivre en paix et prospérité, ou la première finalité est le bien-être du Marocain.
Pour cela et commençons depuis le sommet de l'état :
La Monarchie et ses relations avec les autres pouvoirs et avec les citoyens.
Quelle type de monarchie pour le Maroc du 21ème siècle :
La Monarchie et le Maroc ont traversé les temps, ensemble, pour être ce qu'ils sont aujourd'hui.
Personnellement, et idéalisme à part, une monarchie forte (par sa légitimité, son impartialité et par son pouvoir) permet de garder le pays des différents courants séparatistes qui existent au Nord comme au Sud.
Elle permet aussi d'annihiler toute volonté de groupements ou de personnes de s'imposer aux Marocains par la force physique ou morale.
Schématiquement, l'évolution ultime d'une monarchie (au 21ème siècle) prend la forme d'une monarchie parlementaire.
Le terme monarchie parlementaire peut contenir tout et rien. Elle peut-être un slogan trompeur que certains peuvent utiliser pour leurs propres intérêts.
L'adage en anglais disait "Power corrupts" -le pouvoir corrompt-. Pas nécessairement une corruption matérielle, mais surtout une corruption morale.
Ce qui affaiblit la monarchie, c'est bien les tractations -parfois douteuses- des groupements qui gravitent autour de la monarchie. En utilisant une certaine proximité par rapport à la monarchie, certains n'hésiteront pas à s’accaparer des droits qui ne sont pas les leurs et ainsi ils affaiblissent la légitimité même du système monarchique.
C'est pour cela qu'il est nécessaire que la monarchie soit le gardien et l'arbitre par rapport aux différents pouvoirs qui existent dans le pays, sans prendre parti pour l'un ou l'autre.
Edit du 20 avril : A lire : |
la nomination : Signer le décret de nomination de la personne, qui peut-être proposé par les élus ou par le gouvernement issu indirectement des urnes. (La comparaison avec l'ancienne constitution et le résumé se trouvent en fin d'article). |
Personne du Roi, Arbitre et donc inviolable :
Pour se faire, la personne du monarque, unique représentant de la monarchie doit être intouchable et en aucun cas responsable afin de la protéger de tout parti lésé par quelconque arbitrage à venir. (Exemples, monarchie danoise : qui stipule dans son article 13 "Le Roi est irresponsable ; sa personne est inviolable et sacrée." et monarchie belge article 88 : "La personne du Roi est inviolable; ses ministres sont responsables."
La monarchie doit ainsi suivre un processus d'arbitrage conforme au texte qui régit les pouvoirs dans le pays, à savoir une constitution légitime.
La monarchie devrait avoir le pouvoir d'arbitrage qui se manifeste, entre autres, par le pouvoir :
- de dissoudre le parlement,
- de dissoudre le gouvernement,
- de nommer le premier ministre qui est choisi parmi le groupement politique qui a recueilli le plus de sièges au parlement (ou bien le plus grand nombre de voix -ce qui est différent- mais qui rendra le travail du gouvernement impossible si il n'a pas la majorité parlementaire).
Le parlement après vote de motion de censure peut dissoudre le gouvernement, et le gouvernement peut dissoudre le parlement après accord du Roi. Le parlement ne peut être dissous par le gouvernement quand une motion de censure est déposée. (Article 115 constitution espagnole).
Monarchie et pouvoir religieux :
La monarchie se doit aussi d'avoir une action religieuse et avoir le caractère symbolique du chef religieux suprême. Il est amir Al Mouminine et nomme le président du conseil des oulémas dont les membres sont élus par leurs confrères.(Exemples, l'Angleterre et constitutions nordiques).
Le Roi et l'armée :
La monarchie devrait aussi garder plein pouvoir sur l'armée, afin que celle-ci ne suive pas un courant politique et il est seul habilité à déclarer la guerre après proposition du gouvernement et/ou du parlement. (Le budget de l'armée et son approbation par une commission parlementaire restreinte fera l'objet d'un autre article).
Le Roi et le pouvoir législatif :
Le monarque a aussi le pouvoir de ratifier et promulguer des lois -votées par le parlement-, nommer et révoquer des emplois civils (y compris walis, sur proposition du gouvernement) militaires et présider le conseil du gouvernement sans que pour cela soit obligatoire pour la tenue du conseil. (Exemple : La monarchie espagnole Article 62).
Le Roi et pouvoir économique :
Le monarque a aussi le droit de jouissance sur ses biens, et peut pratiquer des actes commerciaux comme tout autre citoyen. Ces actes commerciaux sont concevables sous forme d'une entité juridique responsable de ses actes et régit par le code de commerce et lois en vigueur.(Exemple : Monarchie Anglaise)
Le Roi et le pouvoir juridique :
Le conseil supérieur de la magistrature devrait être présidé par le président de la cour suprême et comporte un nombre (à délimiter) de membres.
Tout le conseil devrait être nommé par le Roi, dont les 2/3 sont des magistrats et juges, le 1/3 des représentants du parlement et présentés par ce dernier (après vote) au Roi parmi ses membres reconnus pour leur expérience et leur probité.
Le président de la cour suprême est nommé par le Roi après proposition du conseil supérieur de la magistrature. (Constitution espagnole Titre VI, chapitres 122 et 123).
Voilà, j’espère avoir fait le tour de la relation entre Monarchie et pouvoirs. Ces propositions sont ouvertes au débat.
Dans les articles à venir (Nchallah), je parlerai de l'état, des citoyens, des droits d'éligibilité, des régions autonomes, des relations parlement-Gouvernement-Citoyen et des droits individuelles.
Résumé et comparaison avec l'ancienne constitution :
Dans l'ancienne constitution :
1 - Il n y a pas de référence de la relation entre la monarchie et délimitation du pouvoir économique.
2- il n y a pas précision de la modalité de la dissolution du parlement et du gouvernement.
3- Il n y a de processus qui décrit la nomination du Premier ministre et du gouvernement par le Roi. Et donc, fini les ministères de souveraineté, seul le premier ministre choisis ses ministres.
4 - Il n y a pas la notion du Roi qui promulgue les lois qui sont votés par le Parlement. Le format du Dahir n'existe plus dans cette proposition et donc seul les lois qui émanent du parlement sont ratifiées.
5 -Il n y avait pas les postes civils choisis parmi les noms proposés par le gouvernement, y compris walis.
6 - Il n y a pas nécessité de présence du Roi (qui devient facultative) pour la tenue du conseil du Gouvernement.
7 - Le Roi était président du conseil de la magistrature. Là, c'est le président de la cour suprême qui en sera président. La nomination du président de la cour suprême est proposé par le conseil. Et le conseil comporte des élus du peuple, et des magistrats. Le Roi signe la nomination de tout les membres.
Quelques liens utiles :
- Constitution Espagnole : http://mjp.univ-perp.fr/constit/es1978.htm
- Constitution Norvégienne : http://mjp.univ-perp.fr/constit/no1905.htm
- Constitution Belge : http://www.senate.be/doc/const_fr.html