dimanche 11 octobre 2009

Pourquoi il ne faut pas baisser l'impôt sur le revenu l'année prochaine !

Salah-Eddine Mezouar ministre de l'économie Maroc
Le Ministre de l'économie, Salah-Eddine Mezouar prépare le texte de loi de finances 2010, qui prévoit une baisse de l'impôt sur le revenu.

Tout en sachant que c'est une proposition qui risque de paraitre impopulaire, mais Il ne faut Surtout pas baisser d'impôts sur le revenu l'année prochaine.

Pour rappel, l'impôt sur le revenu, est une impôt qui est retenue sur le revenu salarial (en partie). Elle n'est pas fixe : elle augmente au fur et à mesure que l'on touche plus. Pour les plus de 60.000 Dhs par an, elle est de 40% cette année là, par exemple.

Le Gouvernement Abbas El Fassi, a déjà diminué cette taxe l'année dernière. Mais que s'est-il réellement passé ?

Les salariés ont, en partie, retrouvés une augmentation des salaires sur leurs bulletins de paie dès janvier 2009. Ils en étaient ravis. Mais à part la perception positive de la chose, qu'en est-il en réalité ? Sont-ils devenus plus "Riches" en payant Moins de taxes ? Ont-ils pu acquérir plus de richesses avec cette baisse d'impôt ?

Ma réponse est sans équivoque : NON.

La richesse est un concept qui se tient en comparaison avec les autres : Les riches forment une catégorie sociale qui a plus de moyens qu'une grande majorité de la population et qui peut se permettre d'acquérir des biens PLUS que les autres.

En résumé : Riche = Beaucoup de Revenus - Très peu de dépenses.

Alors, qu'est ce qui s'est passé pour la classe moyenne qui a vu son salaire augmenter avec l'aide de la baisse de l'impôt ?
Elle est, tout simplement, restée au même niveau que l'année dernière, et pire, cela va aggraver la situation des plus pauvres !

Voilà ce qui est arrivé à un Marocain de la classe moyenne quand il a eu plus d'argent à dépenser :

Les ressources du Marocain Moyen = Revenus (augmentent) - Dépenses (augmentent aussi)

Quand les revenus ont augmenté, les dépenses ont augmenté aussi. Non pas parce que le Marocain n'a pas su gérer son argent, ou parce qu'il a consommé plus, mais parce que les prix de ses produits consommés ont augmentés : c'est ce qu'on appelle l'inflation !

C'est une règle connue des économistes : quand une grande partie de la population a plus d'argent, c'est mauvais, car cela entraine une augmentation de la demande et par conséquent une augmentation des prix. Et le problème qui peut se poser, c'est quand on gonfle encore plus cette bulle inflationniste.

Celui qui paie les pots cassés, à court terme, c'est le Pauvre, qui n'a pas vu son revenu augmenter de façon consistante, mais qui a surtout vu les prix augmenter en flèche, à cause de la demande de la classe moyenne qui explose.

Ni le marocain moyen, ni le pauvre vont réellement bénéficier de cette baisse.

L'état aussi aura des problèmes à cause de cette baisse : L'état a de moins en moins de revenus.

A terme, l'état aura des problèmes à financer ses investissements (et peut être même ne plus payer ses salariés !!!). Ces baisses dans les investissements entraineront, chômage en plus, pauvreté en plus, développement en moins !
En fait, tout le monde est perdant avec cette baisse, sauf les riches.

Et ce qui me parait encore plus grave, c'est que Le Ministre de l'Économie propose d'augmenter la Taxe sur la consommation du sucre et de l'eau. A part le caractère anti-sociale de cette proposition, elle participera aussi à Augmenter encore les prix de plusieurs denrées essentielles (et encore plus d'inflation).

Au fait, le Ministre de l'économie se tire quasiment une balle dans le pied. Et les Marocains et les syndicats semblent heureux par la proposition de baisser la taxe sur le revenu, alors que ça ne fait l'affaire de personne.

En résumé, la Classe moyenne n'est pas plus riche en payant moins de taxes, elle a juste semblant d'avoir de l'argent en plus, qui sera dépensé encore plus vite (par augmentation des prix). Le pauvre ne pourra pas suivre la cadence des plus riches, et ne pourra plus subvenir à ses besoins.

L'état aura moins d'argent, et en dépensera moins.

Qui a dit que l'Argent faisait Le Bonheur ?

P.S : certains termes ont été simplifiés afin de permettre une lecture accessible aux moins initiés à l'économie.


A lire sur le même sujet :

  1. Rapport du PNUD : Le Maroc perd 4 Places dans son développement Humain.
  2. Pour comprendre la crise à Venir au Maroc et ses conséquences.
  3. 8% de Chômage au Maroc, et les règles d'or pour ne pas être chômeur : Habitez une zone rurale et surtout soyez sans diplômes !


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3 commentaires:

  1. Il est vrai que la baisse de l'IR ne réduit pas les inégalités sociales. Le mieux serait de baisser le taux pour les premières tranches et l'augmenter pour les tranches supérieures.

    Néanmoins, je doute que la baisse de l'IR soit derrière la récente inflation des produits de base. Aussi, la part de l'IR dans les recettes de l'Etat est minimes par rapport à la TVA et à l'IS.

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  2. Je suis d'accord avec toi sur le fait qu'une baisse de l'IR risque de générer de l'inflation.

    Toutefois, il me semble que le secteur informel au Maroc reste très important, un secteur où il n'y a pas d'IR, ni d'IS et TVA.

    Donc cette inflation, me semble-t-il resterait minime et peut être dans des zones comme Rabat ou Casablanca à grande concentration de salariés ou fonctionnaires de l'Etat.

    Cette baisse des différentes taxes serait logique si l'état procédait à une augmentation de l'assiette fiscale.

    Il me semble, à titre d'exemple, qu'il n'y a pas de politique claire pour inciter les acteurs du secteur informel à rendre leurs activités "légales" et contribuer aux recettes de l'état.
    Je suis personnellement en faveur d'une politique de la sorte, à savoir une baisse de l'IR, de la TVA, de l'IS pour dans un premier temps avoir le maximum d'activités économiques formelles, rendre l'agriculture Taxable, et ensuite une politique fiscale en fonction de la politique gouvernementale (royale).

    Sinon, dans un registre plus sophistiqué, il y a cette idée d'ajuster l'IR chaque année en fonction de qui a bénéficié le plus de la croissance, une forme plus égalitaire de redistribution de revenus. [ voir ce billet de Mark Thoma : http://economistsview.typepad.com/economistsview/2008/12/the-rising-tide.html ]

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  3. @ Reda : J'ai eu la même idée que vous concernant l'exonération des couches les plus défavorisées.

    Ceci dit, sur le plan de la consommation locale : la classe moyenne (la vraie, pas de celle de l'HCP) est celle qui consomme le plus et a suffisamment de ressources pour se permettre une chose pareille.

    A travers la baisse de l'IR et d'autres facteurs aussi (qui sont par contre incontrôlables) On entretient une bulle inflationniste qui ne présage rien de bon.

    @ Ayoub :

    Si on me demandait mon avis, 80% des marocains sont dans l'informelle.

    Les 20% restants sont ceux qui s'accaparent le plus de richesses et sont ceux qui sont concernés par cette taxe. C'est aussi eux qui sont "prêts" à payer plus pour des produits dont le prix ne feront qu'augmenter à cause de cette demande.

    Que l'inflation reste circonscrite sur un plan géographique est devenu quasi impossible. Un exemple : la tomate se vend à Casa à 15 dhs, elle se vend à Khmiss zmamra à 5 dhs, le grossiste de tomates en sera informé par téléphone, et préférera vendre sa marchandise à un intermédiaire qui lui offre plus, et en prive ainsi les consommateurs locaux.

    Aux temps de la téléphonie mobile de la fluidité des transports, l'inflation se répercutera sur une grande partie de la population, et plus vite que l'on pense.

    Et puis inciter les gens à passer de l'informel au formel nécessite un travail de fond sur lequel on pourrait débattre assez prochainement sur votre blog à vous tous.

    Et puis, je vous remercie pour ce lien fort interessant : cette réactivité des Taxes est une très très bonne idée.

    Merci !

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